Alors que deux gouverneurs de la Fed, Christopher Waller et Michelle Bowman, s’étaient montrés favorables à une baisse des taux directeurs au cours des derniers jours, le président de la banque centrale américaine, Jerome Powell, a réaffirmé sa volonté de patienter afin d’observer les effets inflationnistes des droits de douane.
Lors de son audition devant la Commission des affaires financières de la Chambre des représentants, Jerome Powell avait déjà expliqué qu’il fermait la porte à une prochaine baisse des taux directeurs en juillet, en raison de l’impact inflationniste attendu de l’instauration des barrières douanières.
Il a profité de son deuxième jour d’audition devant le Congrès pour réaffirmer l’enjeu que représentent les tarifs douaniers, et évidemment leurs impacts sur l’économie américaine. Il reste difficile de prédire dans quelle mesure la hausse des droits de douane pourrait entraîner une hausse des prix, mais le risque qu’ils alimentent une inflation plus persistante est suffisamment important pour inciter la Fed à rester sur ses gardes.
Il a insisté sur l’importance des données économiques des mois de juin et de juillet afin d’étudier les effets sur l’inflation. Il est clair qu’à ce stade, la hausse des droits de douane ne se reflète pas encore dans les prix aux États-Unis. Cela s’explique en partie par les stocks constitués en amont par les entreprises. Les acteurs économiques adapteront progressivement leur stratégie face aux nouvelles pressions inflationnistes.
Face à la hausse des coûts à l’importation, les entreprises américaines chercheront à répercuter ces taxes sur leurs prix de vente, tout en réduisant significativement les volumes importés. Les échanges commerciaux entre les États-Unis et le reste du monde sont donc à surveiller, à commencer par l’évolution de la balance commerciale.
Pour la Fed, une meilleure visibilité sur la situation commerciale (laquelle passera par davantage d’accords) lui permettra de reprendre les baisses de taux directeurs, d’autant que le ralentissement de la croissance américaine devrait se matérialiser au cours de l’été, notamment sur le marché de l’emploi.
L’écart du marché du travail du Conference Board (la part des répondants qui disent que les emplois sont abondants moins ceux qui disent qu’ils sont difficiles à obtenir) a de nouveau diminué en juin pour atteindre un nouveau creux cyclique (et un niveau observé pour la dernière fois début 2017).

Le président de la Fed a été rejoint dans ses propos par plusieurs responsables de la banque centrale, tels que Williams (Fed de New York), Bostic (Fed d’Atlanta) et Barr (gouverneur), qui appellent la banque centrale à maintenir ses taux à leur niveau actuel lors de sa prochaine réunion, en raison du risque inflationniste émanant de la guerre commerciale — et ce, malgré son impact néfaste sur la croissance et les effets de la politique migratoire sur le marché de l’emploi.
Mais cette prudence n’est pas du goût de tout le monde. Donald Trump a de nouveau tiré à boulets rouges sur le patron de la Réserve fédérale. « Une personne mentalement moyenne », dotée d’un « faible QI », une personne « vraiment stupide ». C’est en ces termes que le président des États-Unis, depuis le sommet de l’OTAN, a parlé de Jerome Powell, alors en pleine audition semestrielle au Sénat. Selon le Wall Street Journal (lien), l’exaspération du président Trump face à l’approche lente de la Réserve fédérale en matière de baisse des taux d’intérêt l’incite à envisager d’accélérer lorsqu’il annoncera son choix pour succéder au président Jerome Powell, dont le mandat court encore 11 mois.Cela est de nature à fragiliser le dollar.
La volonté affichée de la Fed de ne pas intervenir face à la déstabilisation économique et à un risque inflationniste récurrent soulève des questions. Mais rien ne presse : dans un contexte budgétaire et commercial incertain, nous estimons que la Fed attendra le mois de septembre, lorsqu’elle disposera d’une meilleure visibilité, pour poursuivre l’assouplissement monétaire.