Au cours des deux premières semaines de septembre 2025, les principaux marchés actions ont continué de progresser :
Performances en $ div. Réinv. | Depuis le 29.08.25 | Depuis le début de l’année |
S&P 500 | +2,35% | +13,4% |
Stoxx 600 | +1,53% | +28,1% |
Nasdaq 100 | +3,71% | +16,2% |
MSCI Monde (développé) | +2,40% | +16,6% |
MSCI Emergents | +6,62% | +27,5% |
Sox Index (indice semi-conducteur de 30 valeurs) | +7,31% | +22,9% |
Au 16.09.25 source Bloomberg
Depuis le début de l’année, trois grands secteurs ont contribué à la progression des actions. Cette tendance s’est poursuivie sur les deux premières semaines de septembre : – les banques européennes, les valeurs de défense/aéronautique, ainsi que les valeurs semi-conducteurs positionnées sur l’Intelligence Artificielle. Intéressons-nous à ce dernier moteur.
Depuis le lancement de ChatGPT en novembre 2023, la demande des consommateurs et des entreprises pour les IA modernes (Large Language Model grand public, spécialisés et les autres programmes informatiques autonomes) ne cesse de croître. Le nombre d’utilisateurs hebdomadaires uniques de ChatGPT a doublé depuis le début de l’année pour atteindre 700 millions en août 2025. Cette dynamique donne confiance aux éditeurs des logiciels d’IA (OpenAI, Anthropic, Xai, META, Mistral…) et aux loueurs de capacité de calcul (Microsoft, Amazon, Alphabet, Oracle). Elle les incite à investir massivement pour répondre à la demande projetée. Contrairement aux dernières grandes vagues d’innovation des technologies de l’information (Smartphones, SaaS, réseaux sociaux, moteurs de recherche), la révolution numérique actuelle demande des investissements en capacité de calcul sans précédent. Quelques chiffres pour l’illustrer : OpenAI a atteint un Chiffre d’Affaires (CA) annualisé de 12 Mds$ cet été et projetterait 20 Mds$ d’ici la fin 2025 et 100Mds$ en 2028 selon le WSJ. Anthropic a quant à lui atteint un CA annualisé de 5 Mds$ cet été. Oracle, le plus petit des quatre grands loueurs américains de capacité de calcul a publié en septembre un carnet de commande en hausse de 328 Mds$ à fin août, soit 455 Mds$. OpenAI serait le principal donneur d’ordre en valeur. Oracle a dévoilé que ce carnet de commande devrait générer pour sa division OCI (Oracle Cloud Infrastructure) un CA de 18 Mds$ pour l’année fiscale 2026 se terminant fin mai 2026 et 144 Mds$ pour l’année fiscale 2030. A titre de comparaison le CA total d’Oracle est de 57 Mds$ en 2025fy, dont 10 Mds$ sur OCI.
- Un marché gigantesque à adresser
Ellison le président-fondateur et principal actionnaire d’Oracle évalue le marché des modèles d’entrainement des IA à plusieurs milliers de milliards $ et le marché du calcul dédié à gérer les requêtes comme devant être « beaucoup plus important ». Dell’Oro projette des dépenses pour les centres de données à plus de mille milliards à horizon 2028. Les groupes META, Microsoft, Amazon, Alphabet, Oracle déploient déjà ensemble 400 Mds$ d’investissements sur leur année fiscale en cours.
- Financement :
En 2025fy, Oracle déployait déjà plus d’investissements tangibles que le cash-flow généré essentiellement par ses anciens métiers (logiciels de base de données et logiciels d’entreprise SaaS et sous licences) : 21 Mds$ de CFO contre 21.2 Mds$ d’investissements. Il est fort possible que sa petite division « cloud data services », vraisemsablement très lucrative et en forte croissance, qui permet depuis très récemment à ses clients de faire tourner leurs bases de données Oracle chez Azure, AWS et Google Cloud Platform soit l’une de ses futures vaches à lait. Elle permettra de combler une partie de son besoin de financement pour OCI.
META et Alphabet peuvent compter sur leur revenu publicitaire très générateur de cash et toujours en croissance pour financer leur ambition en matière d’IA. Microsoft finance les centres de données de nouvelle génération grâce aux profits de ses suites logicielles Saas.
N’existant que depuis quelques années, ChatGPT et Anthropic peuvent compter pour l’instant sur l’afflux de capital privé pour financer leur croissance, en attendant de « monétiser » leur service à grande échelle. Anthropic a levé 13 Mds$ en septembre 2025 sur la base d’une valorisation post-levée de 183 Mds$. Dans le cadre de son augmentation de capital de 40 Mds$ annoncée en mars 2025, OpenAI a réalisé une tranche de 8,3 Mds$ en août 2025, la valorisant 300 Mds$.
Au S1-25, selon Lexology, les levées de fonds pour l’IA ont totalisé 116 Mds$.
- Pour le moment, ce sont les entreprises de semi-conducteurs qui encaissent une grande partie de ces investissements
Nvidia indique que les datacenters les plus avancés demandent chacun une puissance électrique d’un GW et valent 50-60Mds$, dont 35 Mds$ reviendrait à Nvidia.
Toutefois, un ensemble d’autres valeurs profitent de cet appétit pour les centres de données. Le Sox Index un indice semi-conducteur de 30 valeurs progresse de +22,9% depuis le début de l’année et +7,3% au mois de septembre en $. Cinq grandes valeurs sont à l’honneur en septembre : Micron +33%, Broadcom +21%, Lam Research +20%, ASML +18%, TSMC +14% dans le sillage de leur performance depuis le début de l’année +89%, +56%, +68%, +28%, +34%. Micron offre des puces de mémoire, composants à moindre valeur ajoutée comparés aux processeurs mais pourtant essentiels aux programmes d’IA qui manipulent énormément de données. Broadcom conçoit des puces réseaux et des puces dédiées à certains programmes dont les GAFAMs sont particulièrement friands pour limiter leur dépendance à Nvidia et répondre à des besoins spécifiques. LAM Research et ASML sont deux équipementiers leaders des usines de fabrication de semi-conducteurs. Enfin TSMC est un fondeur de puces, incontournable à ce jour sur le segment des puces à très haute valeur ajoutée.
Cette dynamique est très caractéristique du capitalisme américain et plus encore de la Silicon Valley : créer les fondations technologiques d’une nouvelle économie puis dans un second temps organiser le modèle d’affaires. L’essai Zero to One de Peter Thiel permet de comprendre un peu mieux cet état d’esprit. Jean-Baptiste Say exprimait déjà une idée voisine au début du XIXe : « l’offre crée sa propre demande ».