Une BCE dépendante de la FED
Lors des dernières réunions de la BCE l’inquiétude des membres s’est davantage portée sur la dynamique d’activité que sur l’évolution de l’inflation. Les risques pesant à la baisse sur la croissance se sont amplifiés, en particulier pour la consommation. Les risques géopolitiques, l’escalade des tensions commerciales pour les exportations ou encore l’impact du resserrement monétaire devraient amener la BCE à réagir fortement pour soutenir l’économie. Selon Y. Stournaras (banque centrale de Grèce), la hausse des droits de douane des Etats-Unis pourrait même causer une récession et une période de déflation à moyen terme. Les salaires qui restaient un sujet d‘inquiétude pour la maitrise de l’inflation semblent se normaliser dans la plupart des pays. Cette normalisation prendra du temps mais nous nous attendons à un ralentissement plus franc au cours de cette année dans un contexte de faible activité.
Tout se passe comme si la période de forte inflation et de taux maintenus élevés était caduque et que nous pouvions dorénavant entrevoir une période de taux beaucoup plus bas sans crainte.
Dans ses vœux, la présidente de la BCE se dit très confiante dans le retour de l’inflation en deca de 2%.
La politique monétaire devrait donc s’assouplir fortement et rapidement pour soutenir la croissance.
Et pourtant, l’examen de second ordre s’avère loin d’être aisé.
En effet, la politique monétaire des grandes banques centrales doit aussi réagir en fonction de leurs consœurs pour éviter d’engendrer des déséquilibres trop importants. Comme beaucoup d’autres banques centrales (Chine, japon, Angleterre), la BCE ne peut faire fi de l’attitude de la Fed.
Et c’est bien par ce prisme que la situation apparait plus complexe.
Contrairement aux autres zones, les statistiques américaines ont témoigné de la résilience de l’économie. Les promesses de campagne du candidat Trump sont de nature à poursuivre l’amélioration de leur situation. L’économie américaine résiste encore et toujours. L’inflation pourrait repartir et inverser la dynamique de désinflation engagée depuis plusieurs mois.
La Fed devrait pouvoir aisément temporiser avant d’estimer les effets des politiques économiques qui seront mises en œuvre par Donald Trump mais les risques d’un renversement à 180 degrés de la politique monétaire ne sont plus un scénario absurde.
Mais alors, dans ses conditions, la BCE pourra-elle mettre en place la politique accommodante dont la zone a besoin ?
Nous pensons que la situation américaine sera de nature à freiner ses ardeurs au risque de voir sa devise décrocher et d’être encore une fois touchée par une inflation venue de ses importations de produits énergétiques. Le choc d’offre dont l’Europe a souffert n’est pas si loin et les stigmates sont encore présents dans les esprits. Elle devra malgré tout se montrer beaucoup plus prudente qu’elle ne le devrait.
La BCE est bien indépendante des états membres, du pouvoir politique mais elle est devenue dépendante de la FED.