Au Conseil des Gouverneurs de septembre, la BCE a maintenu ses taux d’intérêt directeurs inchangés sans surprise (taux de la facilité de dépôt à 2 %) arguant d’une inflation autour de la cible de 2 %. La principale explication avancée par Christine Lagarde pour expliquer l’arrêt (au moins momentané) des baisses à un niveau terminal de 2 % réside dans l’évolution de l’équilibre des risques sur la croissance économique. En effet par rapport aux perspectives plutôt baissières discutées en juin, les risques sur la croissance sont désormais plus équilibrés :
- L’incertitude entourant la guerre commerciale avec les Etats-Unis a diminué avec la signature d’un accord commercial en juillet ;
- Le risque d’introduction de droits de douane de rétorsion de la part de l’Union Européenne, pesant davantage sur la croissance et l’inflation, a désormais disparu grâce, justement, à la signature de l’accord.
Egalement, par rapport aux projections macroéconomiques présentées en juin, la mise à jour de septembre revoit la croissance à la hausse en 2025 et l’inflation à la hausse en 2025 et 2026 (cf. ci-dessous).
Projections macroéconomiques de septembre 2025
Variations annuelles, en % ; révisions en points de pourcentage

Christine Lagarde qui intervenait en conférence de presse à l’issue de la réunion de politique monétaire, explique ces révisions par une croissance économique résiliente en Zone Euro. Au 1S25, celle-ci a été aidée, non seulement par le fort mouvement de stockage américain en anticipation de l’instauration des droits de douane, boostant les exportations, mais également par le rebond de la consommation des ménages (possible dans un contexte de chômage faible et de rattrapage du pouvoir d’achat) et de l’investissement (baisse graduelle des taux se transmettant doucement aux crédits aux entreprises).
Pour la suite, la croissance européenne resterait portée par la poursuite du rétablissement du pouvoir d’achat des ménages et la baisse de leur taux d’épargne, boostant la consommation d’une part. De l’autre, les effets du plan allemand d’investissement dans la défense et les infrastructures et le décaissement du reste des fonds de la Facilité pour la Reprise et la Résilience, seraient également des soutiens.
Au-delà de l’analyse et de la compréhension des mécanismes ayant aboutis à la décision du jour au sein du Conseil des Gouverneurs, nous retenons de la conférence de presse de Christine Lagarde les éléments suivants :
- La méthode de conduite de la politique monétaire de la BCE n’évolue pas, reste graduelle, réunion après réunion, dépendante aux données, et fondée sur le triptyque des perspectives d’inflation, de la dynamique de l’inflation sous-jacente et de la qualité de la transmission des décisions de politique monétaire à l’économie réelle. Dans ce contexte, si la BCE se trouve désormais dans une position confortable « we continue to be in a good place », cela ne veut pas dire que la suite est prédéfinie : « no predetermined path ».
- La décision du jour avait été prise à l’unanimité du Conseil des Gouverneurs. A cet égard, en réponse à une question soulevant le point de vue faucon d’Isabel Schnabel concernant les risques inflationnistes résiduels, Christine Lagarde répond que la discussion entourant les risques combinait toujours la croissance et l’inflation et pas uniquement l’inflation. Elle répète ainsi l’évolution de l’analyse par rapport à celle faite en juin et qui justifie la pause désormais : les risques entourant la croissance économique sont plus équilibrés. Enfin, sur une note plus imagée, elle rappelle : « I’m owl, neither hawk, nor dove ».
- Enfin, en réponse à de nombreuses questions concernant le cas de la France, Christine Lagarde rappelle qu’elle ne commente pas les situations particulières mais qu’elle peut en revanche affirmer que les marchés de taux continuent de fonctionner correctement et que les conditions de liquidité restent bonnes.
Notre avis : Les nouvelles projections macroéconomiques et l’analyse présentée aujourd’hui par la BCE confortent notre vue d’un taux de dépôt terminal à 2 % d’ici à la fin 2025 en l’absence de choc macroéconomique supplémentaire. L’évolution des taux souverains allemands suite à la conférence de presse vont également dans ce sens : convergence du taux du Bund 2 ans vers les 2 % et quasi stabilité sur le taux du Bund 10 ans autour de 2,65 % après un pic momentané vers les 2,68 %. Affaire à suivre.